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S'occuper de la jeunesse de notre pays

31 Août, 2014

Durant trois mois, Hervé a assuré le suivi du chantier avec Serge. Ancien curé des paroisses de Glo, puis Lokpo, situées à proximité du Centre Damien, c’est en bon connaisseur de la zone qu’il nous livre ses impressions. 
RP_Benin2014_DB_24aout_73Tu as été curé à Glo, puis à Lokpo, deux villages à proximité du Centre Damien. Quelles sont les caractéristiques de la zone ?
C’est pour moi une providence que le Centre Damien se situe sur cette zone. Pourquoi providence ? Tout d’abord parce que Cotonou est devenue une zone très enclavée, si bien que beaucoup de populations se déplacent maintenant vers Glo. Cette zone devient une zone dortoir, appelée à se développer. Ensuite, c’est là que se trouve le grenier de Cotonou et du Bénin. On y cultive de l’ananas, du maïs, des patates douces, du manioc… et beaucoup d’autres choses. Tout cela rend la situation du Centre Damien intéressante : nous sommes au service des pauvres, dans ce qui peut faire, demain, l’essor économique du Bénin et de l’Afrique.
Peut-on dire que le Centre Damien se trouve dans une zone isolée ?
Ce n’est pas une zone isolée du fait des déplacements de la population que j’évoquais. Beaucoup de jeunes plus instruits s’y installent et rencontrent une population rurale. On peut même parler d’une rencontre des cultures. On sent, sur les paroisses, cette émergence apparaître. Ce n’est donc pas une population enclavée, mais plutôt une zone ouverte.
CDM_Chantier_2014_juillet_23653e288eb73e94.pngSur le Centre Damien, un gros travail de labour et de semence a été effectué avec les femmes du village cet été. En quoi est-ce intéressant de développer les liens avec elles ? Cela participe-t-il de la sensibilisation au Centre Damien ?
Chaque année, je sens qu’on fait un pas, mais pas seulement dans un esprit de prévoyance. En arrivant cet été, je ne m’attendais pas à organiser ce travail avec les femmes. Mais cela a été une bonne chose. Je crois qu’il y a un esprit, la providence en l’occurrence, qui est à l’oeuvre dans ce que nous faisons et qui mène lui-même le chantier.
Ce qui a été intéressant avec les femmes, c’est que nous sommes restés dans leur schéma. Or nous voulons vivre avec les gens. Il faut donc commencer progressivement par les connaître et connaître leurs besoins. C’est dans cette proximité-là que quelque chose doit se faire.
CDM_Chantier_2014_juillet_9553e288ea16df9.pngCette année, il y a effectivement eu une petite sensibilisation pour dire aux femmes que c’est pour elles que nous sommes là. Nous, nous pouvons nous débrouiller, nous ne sommes pas tellement dans le besoin. Mais nous voulons que ça change chez elles, nous voulons que leurs enfants connaissent une situation meilleure.
Un autre motif de joie a été la présence des jeunes filles. Elles ont pris leurs vacances pour travailler et gagner un peu d’argent. C’est déjà une attente et une forme d’implication. Désormais, dès que nous serons sur place, elles se manifesteront. Reste maintenant à intéresser les jeunes garçons avec lesquels il y a quelque chose à creuser.
Une prise de conscience a donc commencé avec l’intégration des femmes. Tout n’est pas encore parfait, mais c’est un premier pas.
En quoi le Centre Damien te semble-t-il porteur pour la zone, en particulier pour les enfants ?
Je n’étais pas présent en tant que tel au début du projet. Mon séjour en France m’a permis de m’en rapprocher et de découvrir toute la mobilisation qu’il y a autour. Ayant vécu plusieurs années dans la zone du Centre Damien, je sens que cette population a besoin de beaucoup plus d’attention. Or il faut vraiment une structure désintéressée pour s’occuper d’elle. La politique béninoise vit d’intérêts, elle exploite cette population à des buts électoraux et ne se sent finalement pas concernée par son devenir. De plus, j’ai toujours senti pour que pour l’avenir de notre pays, il faut s’occuper de la jeunesse et des enfants. Déjà à Glo, j’avais initié un suivi auprès des enfants, un peu dans l’esprit du Centre Damien : je rassemblais les enfants le samedi et je reprenais leurs cours. Donc le Centre Damien répond à une attente : il faut s’occuper de façon concrète de cette jeunesse.
RP_Benin2014_Jerome_103Quelles sont les valeurs à transmettre ?
Je vois trois aspects. Il faut d’abord apprendre à cette jeunesse la discipline. C’est bien d’avoir la bonne volonté et de s’investir, mais pour obtenir des choses de valeur, il faut de la rigueur. Or c’est un problème pour ces régions où on fait tout à la fois.
Il faut également éduquer les jeunes à un travail bien fait. Ce n’est pas la peine de faire pour faire. Il faut apprendre à réaliser un travail qui soit bien apprécié. Il y a là une conscience à corriger.
Enfin, il faut leur apprendre la gratuité. On ne touche la joie profonde de ce qu’on fait que dans un esprit désintéressé. Mais quand on est porté par le gain, une fois que l’on a réalisé ce qu’on a à faire, on n’en retire plus rien. Là aussi, il y a un gros travail à mener.
RP_Benin2014_ES_187Enfin, que penses-tu de la dimension interculturelle du Centre Damien ?
Le Bénin est un pays francophone. Or l’éducation et la scolarité dispensées aujourd’hui sont au rabais. Si, par votre présence, nous pouvons renforcer le niveau des enfants, suivre ce qu’ils étudient et les accompagner, c’est déjà un plus. L’ouverture oblige. Vous-mêmes en allant à cette rencontre, vous allez découvrir, à travers les enfants, les valeurs du Bénin. C’est à ce niveau que vous pouvez recevoir.
Ensuite, le Bénin est très pauvre en matière de loisir pour les enfants. Il n’y a pratiquement rien. Créer un centre où les enfants peuvent venir se distraire et jouer, non pas dans le désordre, mais avec une éducation et une pédagogie, je crois que cela ne peut que donner du fruit. En tous cas, je souhaite bon courage à ce projet et je suis plus que déterminé à le soutenir.